Dos

Passage se veut un regard vers le futur, regard à la croisée entre ce qu’une lecture du présent conserve du passé et pousse en même temps vers l’avenir. Au travers de ces Passage, Mehdi Melhaoui accélère le processus de la fossilisation et nous invite à nous immerger sous les eaux originelles afin d’y découvrir ce que passé et présent sont en train d’y déposer. On peut voir ici une forme de retour aux premières formes de vie, l’immersion dans les eaux pouvant être tant ce qui tue que le signe d’une renaissance. Reprenant la fragmentation, le processus de mise en ruine est ici accentué. Par le biais du fragment, informe en rapport à la forme initiale puisqu’il se distingue du tout auquel il participait, on assiste à l’affirmation d’une nouvelle unité possible. Emblème de l’instabilité et du transitoire, l’informe du sujet se pose tel un détour qui figurerait l’irreprésentable. La ruine est telle le déchet d’une société ou d’une civilisation, un symptôme de la crise de ses valeurs, ainsi, elle s’affirme comme ce qui résiste à un désastre. On peut remarquer que le thème des ruines ressurgit à certains moments clés de l’Histoire, les moments de crise, ce qui nous suggère une certaine fonction des ruines. Walter Benjamin parle des ruines telles « la visibilité des sociétés en temps de détresse » et remet en cause l’historicisme illusoire en l’abordant tel un refoulement de la véritable douleur du monde. Sous l’apparente objectivité de l’Histoire, se glisse ainsi une subjectivité indissociable d’un désir de fin glorieuse, et par là, un certain refus inconscient de la catastrophe. Or, reprenant ici encore Benjamin, « il faut fonder le concept de progrès sur l’idée de catastrophe. » Entre politique et poétique, cette promenade visuelle et tactile tente une approche auditive de ce qui n’est pas écrit mais que pourtant l’on peut d’ores et déjà lire.

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